Le trompettiste est Jeremy Pelt, le saxophoniste, Vincent Herring, et comme on dit chez les musiciens de jazz, ça joue ! Ca mérite en tout cas qu'on y aille voir de plus près. Un petit tour sur Google suffit pour retrouver la référence de quelques disques relativement récents de Louis Hayes, sur Amazon (1), pour les commander et les trouver dans la boite aux lettres quelques jours plus tard.
Petit rappel sur Louis Hayes pour commencer. La batterie hardbop avait sa Sainte Trinité, en la personne de Max Roach, d'Art Blakey et Philly Joe Jones. Roy Haynes et Elvin Jones, si irréductiblement modernes et atypiques, gardent une place à part.
Louis Hayes, dont j'ai toujours adoré le jeu, en particulier dans le disque "The Cats", de Tommy Flanagan, avec Coltrane, Idress Sulieman et Kenny Burrell, ainsi que dans "Senor Blues" ou "The Backbeat" d'Horace Silver, vient à mon avis aussitôt après comme l'un des plus éminents représentants d'un style fondé au départ par Kenny Clarke.
Natif de Detroit, comme Kenny Burrell, Tommy Flanagan, Barry Harris et Doug Watkins, son palmarès est des plus impressionnants et on trouve son nom associé à de très nombreuses sessions enregistrées à l'apogée de ce style dit hardbop, aux côtés notamment de John Coltrane (The Believer) . Mais il devra surtout sa célébrité au fait d'avoir été le batteur des formations d' Horace Silver et de Cannonball Adderley. Il jouera ensuite en trio aux côtés de Sam Jones avec Oscar Peterson.
J'ai eu l'occasion de l'entendre il y a a quelques années au Hot Brass d'Aix en Provence en compagnie de George Robert et de Tom Harrell. Son jeu est puissant, équilibré, avec comme chez tous les grands batteurs une assise ferme et un contrôle parfait du geste. Les coups de caisse claire, comme chez Philly Joe Jones sont assénés baguettes relevées haut dans un mouvement d'une grande amplitude, les poignets bougeant à peine. La grosse caisse relance et ponctue avec autorité, pendant que la pulsation entretenue aux cymbales, à la régularité imperturbable, offre au soliste un véritable tapis volant.
"Dreamin of Cannonball" a été enregistré en 2001, à l'époque où Louis Hayes constituait avec le saxophoniste Vincent Herring et le trompettiste Jeremy Pelt une formation appelée Cannonball Legacy Band, en hommage bien sûr au célèbre quintette des deux frères Adderley, dont Hayes fut longtemps le pilier rythmique. On y entend le fameux Work Song (repris par Claude Nougaro sous le nom de "Sing-sing"), ainsi que plusieurs thémes emblématiques du quintet ("The Chant", "Jive Samba", "Scotch and Water", "Del Sasser", "The Chant"). La musique comme on pouvait s'y attendre est d'une belle énergie, Louis Hayes comme Art Blakey avec ses Jazz Messengers, prend un plaisir manifeste à propulser deux brillants solistes de la jeune génération
De la même année 2001, "The Candy Man" offre une semblable dynamique, avec une autre formation composée d'Abraham Burton au saxophone ténor, Riley Mullin à la trompette, Dave Hazeltine au piano, Santi De Briano à la contrebasse. Après un brillant "Pentagon" composé par Hazeltine, la reprise de "Pyramid" constitue un hommage du leader à son autre illustre employeur, Horace Silver, qui avait composé ce théme pour son disque "Further explorations". Comme d'autres compositions de Silver, le thème est absolument superbe dans sa construction, et comporte un petit motif envoûtant qu'on ne peux s'empêcher de conserver en mémoire ou de réécouter en boucle. "Safari" constitue sur un tempo enlevé, un autre hommage à Horace Silver, dont on trouvera une version dans le même "Further explorations". Mais le sommet du disque est sans doute un intrigant et magnifique thème du pianiste Freddie Redd, intitulé "The Thespians", à écouter aussi dans sa version originale (Shades of Redd, Blue Note 14375)
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(1) On les trouve à prix plus que correct sur Amazon, où des fonds entiers de CD, pour la plupart d'inestimables collectors, se retrouvent, mais pour combien de temps encore, bradés à quelques euros chez quelques revendeurs, le plus souvent aux USA, ou au Royaume Uni.
Je suppose qu'il s'agit d'un déstockage massif d'invendus de la part des grandes compagnies éditrices. Il a du se créer un marché de niche, qui trouvera toujours preneur chez quelques fous dans mon genre. De par son ampleur, Internet permet une rentabilité sur les petites quantités de produits peu demandés. C'est ce qu'on appelle l'effet "Long Tail", expression utilisée par Chris Anderson en 2004 pour décrire précisément une part de l'activité de compagnies telles qu'Amazon. Selon cette théorie, il semblerait en effet , et ceci vaut pour les disques et les livres, que la demande totale des articles peu demandés dépasse la demande totale des articles très demandés.
On trouvait bien pour 10 francs fin des années soixante à Paris chez Gibert-Jeune de la place Saint-Michel des 33 tours originaux, de marque Prestige (tous les Coltrane) ou Riverside (tous les Monk), avec leur lourde pochette cartonnée.
A cette exception, les disques américains en édition originale étaient rares et chers à l'époque. Aujourd'hui quelques clics suffisent pour retrouver en quelques jours à prix modique dans sa boite aux lettres des titres qu'eussent convoités les plus pointus et les plus fortunés des collectionneurs.
Il est au reste intéressant de noter qu'en ce qui concerne le jazz, mais cela vaut aussi pour le classique, le vendeur indique souvent par exemple "2 ex. left order soon !" . Ce qui signifie qu'une fois les deux exemplaires restants vendus, la référence deviendra chez lui indisponible pour un temps indéterminé, voire définitivement.
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